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Les Tribus, vues par Samuel Guégan, Directeur de recherche et ethnologue

Qu'est ce qu'une tribu ?

Au cours des siĂšcles, la notion de « tribu » n’a jamais cessĂ© d’évoluer dans ses contours, sa dĂ©finition et sa terminologie (« sociĂ©tĂ© tribale », « ethnicitĂ© », « peuple » ). Initialement, la « tribu » est communĂ©ment dĂ©finie comme une sociĂ©tĂ© homogĂšne organisĂ©e autour d’un lien de parentĂ© ; des familles regroupĂ©es avec un mĂȘme ascendant (homme ou femme). Son idĂ©ologie sociale est toujours basĂ©e sur la solidaritĂ© et l’entraide avec obligation d’assistance mutuelle entre les membres et les gĂ©nĂ©rations qui la composent. Il y a donc bien une notion de singularitĂ© dans la « tribu » dans sa dĂ©finition premiĂšre, avec une identitĂ© collective partagĂ©e et dĂ©limitĂ©e considĂ©rant des individus comme Ă©trangers extĂ©rieurs Ă  la tribu : endogroupe vs. exogroupe, « nous » vs. « les autres ». Sa taille et sa durĂ©e peuvent ĂȘtre variables avec des « clans », qui s’associent, par exemple, temporairement Ă  des fins religieuses ou militaires. Certains ethnologues y ont ajoutĂ© deux notions supplĂ©mentaires : le territoire et la culture, notamment au travers des Ă©lĂ©ments linguistiques partagĂ©s et d’une certaine conception de la vie ou d’un systĂšme de valeurs.

Chaque membre est représentant de sa tribu de coeur et de sa singularité.

Ainsi, la « tribu » se situe Ă  Ă©quidistance de la famille (cellule primale fondĂ©e sur le mariage) et l’État (caractĂ©risĂ© par un « gouvernement centralisĂ©, une souverainetĂ© territoriale, un corps administratif spĂ©cialisĂ© et un monopole de l'emploi lĂ©gitime de la force » selon S.F Nadel). Pour terminer, un courant d’anthropologie du XXĂšme siĂšcle va encore plus loin. Il met l’accent sur l’importance des rites de passage, qui englobe des Ă©lĂ©ments distinctifs (blason, Ă©cusson, scarification, objets protĂ©iformes
) comme pierre angulaire et fonction fondatrice de la tribu bien au-delĂ  de tout lien de parentĂ© et d’appartenance territoriale. La tribu peut ainsi se rĂ©sumer en un « groupe homogĂšne linguistique, culturelle, Ă©conomique ou politique, ayant un destin commun et des rites de passage ». Et du point de vue des anthropologues « primordialistes », tous ces critĂšres objectifs (parentĂ©, nationalitĂ©, histoire, langue, valeurs, croyances
) sont des donnĂ©es « naturelles ». DĂšs la naissance, nous faisons tous partie d’une tribu, quelle qu’elle soit, malgrĂ© nous !

La tribu au 21Ăšme siĂšcle

La nouveautĂ© dans nos sociĂ©tĂ©s contemporaines rĂ©side dans le fait que les individus ont la capacitĂ© maintenant de choisir leurs tribus d’appartenance et de s’extraire de celles oĂč ils sont nĂ©s. Face Ă  l’épuisement des institutions, la transmutation des valeurs et des idĂ©ologies, l’ouverture Ă  l’hyper-monde mĂ©langeant une mosaĂŻque d’identitĂ©s et d’appartenances diverses, l’extra-territorialitĂ© polymorphe
 les individus se cherchent de nouvelles appartenances non plus hĂ©ritĂ©es, mais par rapport Ă  leurs propres goĂ»ts, affinitĂ©s, envies, modes de vie en commun... Des communautĂ©s de « gens qui leur ressemblent». La passion pour le skateboard, l’Extreme Hardcore Metal, le vĂ©ganisme, un club de foot ou de tricot... Ces tribus de coeur sont maintenant des vecteurs d’identification plus puissants que les cadres sociaux primaires, car elles sont choisies par les individus qui se retrouvent autour d’une passion commune (contrairement Ă  la famille ou la nationalitĂ©, dont on hĂ©rite) ; avec sa cohorte de signes distinctifs et d’appartenance, rites de passage, mythologies et rĂ©cits, tenues vestimentaires
 Pour les ethnologues contemporains, elles sont amenĂ©es Ă  gagner en importance compte-tenu de l’éclatement des cadres et des rĂ©fĂ©rents anciens.